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Ethique et politique

par Benjamin Boudou

Cette année le thème des cours est:

Puissance de la démocratie

  • Jeudi 21 Janvier 2016 au Pavillon Duhamel à 19h30
  • Jeudi 18 Février 2016 au Pavillon Duhamel à 19h30
  • Jeudi 17 Mars 2016 au Pavillon Duhamel à 19h30

Présentation du cours 2015 - 2016

Puissance de la démocratie

Nos sociétés vont mal, dit-on. Nos représentants ne nous représentent plus, nos institutions ne font plus leur travail, les citoyens n’ont plus de valeurs communes et se désintéressent de la politique, l’économie nous asservit, la souveraineté se désagrège. Le problème de ce constat pessimiste est qu’il sert trop souvent des intérêts idéologiques : puisque la politique va mal, cessons de faire de la politique, puisque les démocraties s’effondrent, donnons-leur le coup de grâce, puisque les élus nous mentent, votons pour ceux qui n’ont jamais eu le pouvoir.

 

Cette crise politique tend à jeter le discrédit sur le pouvoir démocratique. Or, il s’agit de la véritable ressource pour lutter contre ces maux. On se demandera alors ce qui fonde la légitimité du pouvoir démocratique, pourquoi il a suscité tant de critiques, et dans quelle mesure il fournit les moyens adaptés pour lutter contre la domination.

 

Ce cours développera ainsi l’idée d’une « puissance » de la démocratie, à savoir cette énergie particulière issue de l’action des citoyens pour créer collectivement leur autonomie et contrôler le pouvoir qui les affecte. On distinguera trois modes particuliers de cette puissance : la démocratie comme puissance sociale (vertu de l’égalité démocratique), puissance épistémique (vertu de la décision démocratique), et puissance politique (vertu de l’autonomie démocratique).

 

1ère séance : Face au lieu vide : puissance et impuissance du pouvoir démocratique

Dans la première séance, nous essaierons de comprendre pourquoi le pouvoir démocratique semble toujours insatisfaisant : les citoyens peinent à voir quelle influence réelle ils peuvent avoir sur les représentants, les représentants ne cessent d’afficher leur incapacité à agir, les États démocratiques parviennent difficilement à revendiquer leur pouvoir à l’échelle internationale. La caractéristique de la démocratie serait-elle son impuissance ?

À travers des situations concrètes – il est avéré par exemple que les famines n’apparaissent que dans les pays non démocratiques – et quelques grandes théories de la démocratie, nous verrons que cette impuissance constitue la source de la légitimité de ce pouvoir nécessairement partagé et désincarné, et que l’insatisfaction des citoyens est le moteur même de la puissance démocratique. 

2ème séance : Face aux ennemis : d’une certaine fragilité des convictions

Ce cours est consacré aux ennemis de la démocratie. La révolution conservatrice qui lutte, de manière plus ou moins insidieuse, contre les aspirations à l’égalité et à la liberté mérite notre attention car elle est née avec la démocratie et ne s’est jamais terminée. Qui sont ces ennemis, et que reprochent-ils exactement à la démocratie ? Sont-ils pour autant des anti-démocrates, ou simplement des démocrates insatisfaits ? Les problèmes viennent-ils de la démocratie elle-même, ou du libéralisme, de l’individualisme, de la modernité, etc. ?

Après une analyse des motivations sociales, politiques et philosophiques de Platon, premier des anti-démocrates, à lutter contre le pouvoir populaire au nom d’un retour de l’aristocratie, je présenterai cinq grandes familles d’ennemis. Depuis les contre-révolutionnaires catholiques jusqu’à la gauche radicale contemporaine, tous partagent une même dénonciation de la démocratie comme régime du manque : les ennemis de l’égalité (la démocratie sans ordre), les ennemis de l’universel (la démocratie sans corps), les ennemis de l’immanence (la démocratie sans vérité), les ennemis de la discussion (la démocratie sans chef), et les ennemis du vote (la démocratie sans ambition révolutionnaire).

3ème séance : Face à la domination : comment démocratiser les rapports de pouvoir

La troisième séance s’intéressera à la démocratie (plus exactement la démocratisation) comme une ressource essentielle pour réaliser la justice : il faut se demander comment démocratiser les relations de pouvoir, pour éviter qu’elles ne se transforment en domination. Au travail, à l’école, en famille, dans la communauté internationale, et bien sûr dans nos institutions politiques, la démocratie exige que celles et ceux qui sont affectés par une décision aient leur mot à dire. Quels sont les moyens de réaliser cette autonomie, et quelles en sont les conséquences ? 

Bibliographie indicative (par ordre alphabétique) :

  • Daniele Archibugi, La démocratie cosmopolite, Paris, Cerf, 2009
  • Cornelius Castoriadis, La montée de l’insignifiance, Paris, Seuil, 1996
  • Robert Dahl, Democracy and its Critics, New Haven, Yale University Press, 1989
  • Jacques Derrida, Voyous, Paris, Galilée, 2003
  • John Dewey, Le public et ses problèmes [1927], Paris, Folio essais, 2010
  • Claude Lefort, Essais sur le politique, Paris, Seuil, 2001
  • Dominique Rousseau, Radicaliser la démocratie, Paris, Seuil, 2015
  • Ian Shapiro, Democratic Justice, New Haven, Yale University Press, 1999
  • Baruch Spinoza, Traité politique [1678], Paris, PUF, 2005
  • Alexis de Tocqueville, De la démocratie en Amérique [1835-1840], Paris, Gallimard, 1992

Présentation du cycle "Ethique et Politique"

Ce cours est une introduction à la théorie politique. Chaque année sera orientée par un concept général, décliné en quatre ou cinq questions. La théorie politique est l’étude de l’articulation entre nos valeurs et nos pratiques politiques. Elle peut être descriptive (étudier la nature de nos valeurs politiques – ce à quoi l’on tient –, le degré de cohérence entre elles, et entre les valeurs et leur mise en pratique), ou normative (démontrer ce que l’on devrait faire ou dire pour s’assurer de la légitimité de nos valeurs et de nos pratiques).

Le cours s’intitule « Ethique et politique ». La politique articule la tension entre l’individu et les institutions, entre le pouvoir (légitime) et la domination (illégitime), et pose la question générale : comment bien se gouverner ? L’éthique articule la tension entre la liberté et la responsabilité, et pose la question générale : comment mener une vie bonne ? Le but du cours est d’étudier les points d’intersection et de contradiction de ces deux questions, non pas de manière historique ou systématique, mais autour d’enjeux qui nous forcent à penser.

Présentation de l'intervenant

Benjamin Boudou est docteur en science politique, actuellement enseignat à Sciences Po et rédacteur en chef de la revue Raisons politiques. Il prépare deux ouvrages de théorioe politique intitulés Politique de l'hospitalité: une généalogie conceptuelle et Philosophie politique de l'immigration.

Contacts :

benjamin.boudou@sciencespo.fr

www.benjaminboudou.com

Portrait benjamin

pour mémoire les années précédentes

2014 / 2015

Les conditions politiques de la liberté

Jeudi 18 Décembre 2014 à 19h30 au Pavillon Duhamel:

Peut-on se mettre d’accord sur le sens de la liberté ? La liberté comme problème de théorie politique

Quelques thèmes : Liberté négative/positive, libertarianisme, libéralisme, républicanisme

Quelques auteurs : Platon, Jean-Jacques Rousseau, Benjamin Constant, Isaiah Berlin

Vendredi 23 Janvier 2015 à 19h30 au Pavillon Duhamel

Le consentement rend-il tout accord légitime ?  La liberté sous contraintes

Quelques thèmes : Vente d’organe, esclavage volontaire, législation sur le sado-masochisme, liberté de se nuire

Quelques auteurs : Thomas Hobbes, John Locke, Robert Nozick, Michael Sandel, Joel Feinberg

Vendredi 27 Février 2015 à 19h30 au Pavillon Duhamel

Mieux vaut-il obéir ou résister ? La liberté face au pouvoir souverain

Quelques thèmes : Droit de résistance, sécurité/liberté, désobéissance civile

Quelques auteurs : Thomas Hobbes, John Locke, Henry D. Thoreau, John Rawls

 Ce troisième cours est consacré au problème de l’exercice de la liberté face au pouvoir politique. Comment vivre libre lorsque nous vivons en société ? Pourquoi la grand nombre doit-il obéir à un petit nombre d’élus ? Quelles sont les conditions d’une désobéissance face à des lois qui ne semblent plus légitimes ? Telles sont les questions que nous aborderons en tentant de comprendre comment se légitime le pouvoir, et en suivant de près deux philosophes classiques, Thomas Hobbes et John Locke, qui se sont opposés sur la possibilité de la résistance et sur l’étendue des prérogatives du souverain.

Vendredi 3 Avril 2015 à 19h30 lieu à l'Agora - Salle E

L’exercice de notre liberté s’arrête-t-il aux frontières des États ?

Quelques thèmes : Liberté de mouvement, statut moral des États, cosmopolitisme, droits de l’Homme

Quelques auteurs : Hugo Grotius, Emmanuel Kant, Michael Walzer, Seyla Benhabib

 Ce cours déplace le problème de la liberté aux frontières de nos communautés politiques: si nous croyons fermement que nous devons être libres d'aller et venir dans notre pays, pourquoi cette liberté devrait-elle s'arrêter aux frontières nationales? Les justifications que l'on donne pour limiter ou contrôler l'immigration sont-elles cohérentes avec nos valeurs démocratiques? Peut-on exiger des nouveaux venus qu'ils partagent notre culture, notre langue, etc ? Ces questions sont au coeur de l'actualité, elles engagent des définitions contradictoires de la nation, de la citoyenneté, ou de la souveraineté, il s'agira donc de les analyser historiquement et théoriquement pour réfléchir à la possibilité de frontières justes.

Vendredi 19 Juin 2015 à 19h30 au Pavillon Duhamel

Peut-on limiter la liberté d’expression ? Les dilemmes de la censure

avec un invité: Denis Ramond

Le droit relatif à la liberté d’expression distingue deux types d’atteintes causées par des discours. D’un côté, les injures, la diffamation, les menaces, les provocations à la violence et à la discrimination, sont des délits punis par la loi. De l’autre, les attaques aux symboles, aux religions, aux convictions et aux valeurs sont, en principe, autorisées, même si certains s’estiment « offensés », « blessés » ou « heurtés ». Cette distinction a été réaffirmée publiquement par Manuel Valls, pour opposer le droit au blasphème exercé par les journalistes de Charlie Hebdo et les propos antisémites de l’humoriste Dieudonné.

Cette distinction existe également en philosophie politique, qui sépare les « offenses » et les « préjudices ». On analysera les fondements et la solidité de cette distinction, qui se trouve au cœur des débats récents relatifs à la liberté d’expression.  

L'invité:

Denis Ramond est doctorant à Sciences Po et prépare une thèse sur la liberté d’expression en France et aux États-Unis à travers l’exemple des débats autour de la pornographie. 
 
Bibliographie

John Stuart Mill, De la Liberté (1859), Paris, Gallimard, 1990

Ruwen Ogien, La Liberté d'offenser, Paris, La Musardine, 2007

Quelques thèmes : Pornographie, blasphème, outrage aux symboles nationaux, condition épistémique de la démocratie

Quelques auteurs : Baruch Spinoza, John Stuart Mill, T.M. Scanlon, Stanley Fisch, Ruwen Ogien

 

 

Date de dernière mise à jour : 13/08/2016