Le polar contemporain et la société

par Stéphane BERNARD

Vendredi 17 Mars 2017 à 19h30 à la librairie 'la Nouvelle Réserve" à Limay

Présentation de la conférence

Le sociologue Luc Boltanski (dans son gros livre Enigmes et complots – Une enquête à propos d'enquêtes, Gallimard, 2012, 460 p.) part du constat suivant : roman policier, sociologie et paranoïa sont trois formes d’enquêtes, de questionnement du réel,  nées simultanément, à la fin du XIXe siècle, au moment du développement de l’État-nation.

 

Ce livre est plein d'analyses lumineuses et éclairantes sur le développement de ce genre littéraire jusqu’au milieu du XXe avec des analyses très fouillées sur le détective anglais (Holmes) et le policier français (Maigret), et leur façon de questionner (enquêtes !) leur société respective. Il mériterait en lui-même une exposition détaillée, à croiser avec d'autres analyses, littéraires par exemple, car tel n'est pas le propos de Boltanski. Ce ne sera pas l'objet de ce cours.

 

De même, nous n'aborderons pas ce genre sous l'angle historique (plusieurs séances seraient nécessaires pour l'effleurer). Nous ne nous étendrons pas non plus sur une typologie, d'ailleurs impossible, car difficile à définir et à délimiter de manière un minimum consensuelle. Roman policier et roman d'espionnage des origines (tels que définis par Boltanski dans leur rapport respectivement à l'énigme et au complot – d'où le rapport à la paranoïa) : jusque-là ça va ! Mais que faites-vous des romans noirs, des thrillers, des romans de terreur, des anticipations rétrospectives ou des thrillers futuristes, qui empruntent les codes du  genre et ont des lectorats partiellement communs ? Pour la période contemporaine nous regrouperons tout sous le vocable « polar », en essayant de ne pas utiliser ce terme pour des sous-genres particuliers (sauf peut-être géographique : polar suédois, polar israélien ou sud-africain…).

 

Voilà le cadre théorique et le point de départ de notre réflexion sur le polar contemporain dans son rapport à la société. Quelques pistes :

* polar et justice (ou injustice)

* polar et démocratie

* polar et liberté

* polar et classes sociales

* polar et villes

* polar et mondialisation 

 

Sur tous ces thèmes (et quelques autres) on va se demander (exemples à l'appui bien sûr) dans quelle mesure le polar est à la fois un reflet de la réalité, mais aussi un moyen d'appréhender un univers, et même parfois, en allant plus loin, un outil de déconstruction et de connaissance du réel.

 

On verra comment (différemment pour chaque auteur) l'enquête va consister à passer au peigne fin un univers, à travers l'action professionnelle d'un observateur hors normes, qui va mener des entretiens (interrogatoires), construire des objets à partir des hypothèses et des vérifications de terrain pour résoudre une énigme, mais parfois aussi mettre à jour une situation plus vaste, plus complexe, dévoilant d'autres circuits à notre compréhension.

 

On retrouve finalement  l'interrogation de Luc Boltanski sur la méthode des sciences sociales, qui est la véritable raison de son détour inattendu par le roman policier.

 

La différence pour nous (sauf  pour quelques fondus de sociologie, j'en connais), c'est que ce qui nous fait vibrer en premier ce sont les balles qui sifflent autour de notre héros pendant qu'il fait tout ça. Il y a aussi les chausse-trappes bureaucratiques ou politiciennes qui s'ouvrent sous ses pas,  les monstres auxquels il est confronté et qui, parfois, lui (nous) ressemblent quand même. Sans oublier le fait qu'il soit parfois (souvent) border line pour arriver à ses fins (comme nous aimerions parfois pouvoir l'être pour corriger les injustices les plus criantes). Et donc nos cœurs battent plus vite, nos mains deviennent fébriles pour tourner les pages, et on finit même  parfois, en y réfléchissant un peu, à trouver les raisons littéraires qui font qu'un grand auteur de polar suscite tout cela en nous.

Présentation de l'intervenant

à venir

Date de dernière mise à jour : 23/09/2016

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